12 octobre 2008

That's the Spirit !


Dans la mise en image de toute biopic se pose la question du choix des comédiens : qui va bien pouvoir incarner le personnage dont on retrace l’existence ? Il convient d’être ressemblant, un minimum, pour être crédible, un maximum. Combien de critiques et autres observateurs cinéphiles ne manquèrent pas de s’extasier devant la métamorphose de ces comédiens qui, l’espace d’un film, nous ont fait croire qu’ils étaient une autre figure connue. C’est évidemment beaucoup plus difficile d’être crédible dans le rôle de quelqu’un dont le visage est familier que dans celui d’un personnage inconnu.
Ah oui, vraiment ?


Bien sûr on se heurte à l’Image, celle dont toute célébrité est affublée et qui varie un peu au gré des relais médiatiques. On peut choisir de s’y calquer ou au contraire de s’en dégager, mais cette Image constitue un point de repère qui est le fondement de la biopic. Et finalement cette image n’est-elle pas un matelas confortable sur lequel les comédiens peuvent venir se reposer ? N’est-ce pas finalement plus délicat de créer un lien empathique avec un personnage qui n’a jamais eu d’existence que dans l’imagination d’un scénariste ?

Lorsqu’il a choisi 6 acteurs différents (vraiment différents) pour incarner Bob Dylan dans « I’m not there » Todd Haynes n’a pas choisi la facilité. Mais c’est pourtant ce choix qui lui a permis d’atteindre, non pas l’Image du chanteur, mais l’esprit d’un homme. Un homme qui, comme tout un chacun, n’a cessé d’évoluer au cours de sa vie. Autant de facettes de Dylan, autant de comédiens. Aucun d’entre eux ne représente le vrai Dylan, et cette vérité qui est la faille de toute biopic, Haynes l’assume pleinement dès le début. Débarrassons-nous d’une réalité que nous ne pourrons jamais atteindre et faisons ce que nous savons faire : de la fiction. En effet la biopic, bien qu’inspirée d’une vie, ne constitue pas un documentaire et à confondre réalité et cinéma, on porte atteinte à la vérité de ces figures légendaires que le cinéaste ne connaît pas aussi bien qu’il voudrait souvent le faire croire.

Je crois que le secret d’une adaptation réussie n’est pas dans la fidélité mais dans la « capture » de l’Esprit d’une œuvre. Il en va de même pour la biopic et Todd Haynes, en assumant l’imperfection de son média, a su représenter l’Esprit de Dylan beaucoup plus facilement et avec bien plus de respect pour son sujet que s’il s’était soucié de fidélité réaliste.

« L’identité n’est pas donnée une fois pour toutes, elle se construit et se transforme tout au long de l’existence. »
Amin Maalouf

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